Bonne nouvelle ?

 

La crise mondialisée consécutive à la pandémie de Covid-19 n’aura pas que des effets négatifs.
Passons sur les bénéfices environnementaux, sociaux, géo-politiques qu’entraîne déjà cette mise au pas forcée des sociétés de surconsommation, et regardons ses impacts positifs sur la Culture. Faisons-le par le prisme de la promotion du cinéma d’animation, par exemple, au hasard.

Questions oratoires.
• L’annulation (effective, probable ou potentielle) de la plupart des festivals de films – nationaux et internationaux – est-elle une mauvaise nouvelle ?
• L’annualisation de la majorité d’entre eux et leur prolifération déraisonnable, en France notamment, ne nous a-t-elle pas conduit à un stade de saturation ?
• Celui-ci ne pénalise-t-il pas tous les niveaux de ce secteur d’activités, des créateurs jusqu’aux publics, en passant par les producteurs, les techniciens et les diffuseurs ?
• A l’exception d’une pelletée d’initié(e)s plus ou moins fétichistes, qui se souvient des films, longs ou courts, récompensés et/ou encensés il y a deux ans à peine ?
• Avons-nous l’espace et le temps de cerveau disponible pour le recul, nécessaire à toute appréciation critique, sur ces œuvres et sur l’ensemble d’une production, dont la qualité artistique est  surévaluée du fait même de la quantité incommensurable des contenus qui inondent les écrans de tout type ?

Tous les experts sérieux le répètent à l’envi, tout le monde s’en plaint : trop de films sont produits, se concurrencent, s’interchangent chaque année.
Leur distribution est bâclée et leur existence face aux publics est éphémère.
Les courts métrages et autres séquences démonstratives, valorisé(e)s ici et là sur le web et les réseaux sociaux, n’échappent pas à cette logique du vite-vu/vite-oublié. Laquelle favorise, entre autres dommages collatéraux, déni médiatique et conformisme généralisé, perceptibles dès le financement des films, au sein des jurys de commissions d’aide, jusque dans les recoins de la blogosphère culturelle. Un règne du consensus mou que les esprits grognons les moins virulents qualifient de « syndrome Télérama » ou « syndrome France Inter ».
Autrement dit, la massification tue le désir.

Imaginons donc une année blanche, vierge de toute sortie cinématographique. (D’emblée, l’effort poussif que ce fantasme requiert nous alerte !)
Et puis, soyons fous, pendant qu’on y est, rêvons d’une année débarrassée de toute cérémonie d’autocélébration corporatiste et des pollutions médiatiques qui les accompagnent.
Imaginons que nous puissions visionner beaucoup, beaucoup moins d’œuvres et prendre le temps de laisser mijoter celles-ci dans notre tête, d’y revenir si besoin et d’en apprécier posément la valeur artistique, c’est-à-dire leur rapport à l’esthétique, à la narration, à l’émotion, au monde, aux œuvres qui les ont précédées et à celles qui leur succèderont.
Imaginons une pause, en somme. Un repos tellement salutaire qu’on aurait envie de le prolonger une année de plus.
Sentez-vous un tant soit peu le bonheur plausible de contempler, après une longue d’hibernation audio-visuelle, l’éclosion printanière des œuvres conçues et affinées sans précipitation, sans échéances festivalières, libérées des injonctions compétitives et performatives ?

Non ?
Je vous plains sincèrement.

 

En-tête : amabie (prononcer « amabié « ) animée par Tomotaka. Selon le croyance populaire japonaise, l’amabie est une sorte de sirène, un esprit (yokai), dont on envoie une représentation dessinée aux personnes malades pour les sauver d’une épidémie.

 

 

 

anima