electra

 

 

Un film de Daria Kashcheeva
Titre original : idem
Année de sortie : 2023
Origine(s) : Russie, République Tchèque, France, Slovaquie

 

Where « are we all just dating our dad ? »

 

 

Quelques mots sur le film et sa réalisatrice

Forte d’une consécration mondiale amplement méritée grâce à son excellent film de fin d’études, Daughter (Sa fille), la réalisatrice tchéquo-russe Daria Kashcheeva poursuit son ascension à toute berzingue vers les sommets. Dans son second film, elle approfondit, avec des moyens dignes d’une super-production, son exploration du concept psychanalytique du complexe d’Électre, sorte d’équivalent du complexe d’Œdipe, tous deux censés expliquer le déterminisme des sexualités masculine et féminine, tout en  convoquant les personnages mythologiques d’Agamemnon (le père), Electre (sa fille) et Clytemnestre (la mère, possible meurtrière d’Agamemnon).
Electra est un film plus expérimental (basé sur la matière même du cinéma de marionnettes) que narratif, hybridé à l’extrême (animation d’acteurs/pixilation, animation d’objets, images de synthèses), une sorte de funambule insolent en équilibre maîtrisé sur les frontières de genres et de registres techniques. Je ne peux m’empêcher d’y voir aussi un bras d’honneur flamboyant au règne de l’image sur-digitalisée, en regrettant cependant que son côté provocateur ne demeure, du début à la fin, que mollement subversif.

A 36 ans, Daria Kashcheeva est indiscutablement une cinéaste surdouée et elle le sait. Electra le confirme d’une manière suffisamment ostentatoire pour énerver au passage ses homologues qui galèrent généralement une ou deux décennies avant de disposer d’une même force de frappe cinématographique. Mais si ce long court métrage de 26 minutes marque profondément l’esprit du spectateur adolescents et adultes, et devrait diviser sous peu les commentateurs du festival d’Annecy sur la question vaine de la nature ambivalente d’un tel film, je me demande toutefois si Daria Kashcheeva n’en fait pas un peu trop pour nous en dire si peu.
Démonstratif à bien des égards (Daughter avait su cultiver une si belle humilité !), presque didactique (Freud et Jung pour les nuls passés au sanibroyeur post-MeToo ?), probable métaphore politique anti-Poutine*, Electra me paraît parfaitement calibré pour l’exportation internationale et le palmarès des grandes compétitions. Et les nombreux échos à la figure tutélaire de Jan Svankmajer (et à son Alice, en particulier) – après ceux de Daughter à Jirí Trnka et Bretislav Pojar – semblent accessoirement positionner Daria Kashcheeva en étendard reluisant d’une renaissance tant attendue de l’animation tchèque à l’héritage si prestigieux.

 

 

 

* Militante anti-Poutine, Daria Kashcheeva s’est exilée en Tchéquie depuis 2014. Electra pourrait évoquer – ce n’est qu’un sentiment personnel encore assez peu fondé – un régime patriarcal jusqu’à la caricature, marqué par l’hyper-sexualisation des jeunes femmes et la discrimination des identités sexuelles marginales.

 

 

 

anima