FAQ “Desseins animés”

 

Voilà une bonne décennie que ce web media, croisement entre le blog et l’inventaire commenté de ressources dédiées, est en ligne ! C’est l’occasion idéale pour publier la traduction d’une partie de l’interview que j’ai récemment donnée au blog américain “Animation Nightmare”, interview qui – ça tombe vraiment bien – rejoint peu ou proue les questions les plus fréquemment posées par les lectrices et lecteurs de “Desseins animés”.

 

 

Quelles sont les raisons qui ont motivé et motivent encore la publication de “Desseins animés” ?

Comme je l’explique en partie dans cette page, après avoir cessé l’actualisation de l’un des tout premiers sites web français dédié au cinéma d’animation international que je publiais depuis l’année 2000, je poursuivais mon travail de veille en accumulant différents types de ressources que j’avais besoin d’archiver numériquement. En 2011, j’ai commencé à utiliser des systèmes de gestion de contenus (CMS) pour cela. Vers 2014, DeA a connu une augmentation soudaine et inattendue de ses audiences, j’ai donc commencé à éditorialiser ses articles afin de les rendre un peu moins rigides et moins froids.
Dix ans plus tard, mon approche n’a pas changé. DeA reste avant tout un outil professionnel, résultat d’une veille personnelle permanente, gratuitement mis à disposition des internautes de tous les pays. Cet outil demeure exclusivement francophone.
A ce jour, DeA contient plus de 2 000 articles de longueur variable, classés par catégories et tagués avec pas moins de 400 “étiquettes” (portes d’entrée) différentes.
Je suis convaincu que la création animée vit actuellement une phase déterminante de son histoire, marquée par une hyper-hybridation et une hyper-transversalité, lesquelles pourraient bien en faire le mode de création dominant du 21e siècle (s’il ne l’est pas déjà). Je m’efforce avec un certain plaisir de collecter les signaux ostensibles ou discrets de cette transition en cours.

 

 

Comment sont choisis les œuvres, les artistes, les sujets évoqués dans “Desseins animés” ?

Je scrute presque quotidiennement différents canaux d’informations plus ou moins spécialisés, en privilégiant ceux dont la ligne éditoriale dépasse le simple brassage de “brèves” d’actualité généralement puisées à la même source.
Les sujets s’imposent d’eux-mêmes dès lors qu’ils présentent un intérêt, proche ou lointain, pour mon travail d’historien de la création animée, d’enseignant et conférencier (notamment pour les dispositifs d’éducation à l’image), ou pour ma culture personnelle. Il va de soi que je passe forcément à côté d’informations importantes. Je ne vise donc ni l’exhaustivité, ni l’exclusivité.
On comprend vite en le consultant régulièrement que la ligne éditoriale naturelle de DeA accorde peu de considérations aux contenus télévisuels, sauf quand ils sortent de l’ordinaire. Je nourris aussi une croissante aversion à l’égard du maniérisme prétentieux et égocentré d’une partie importante de la production française que je continue de subir par ailleurs dans mon travail de programmation en salles, en particulier.
Si certains studios, personnalités ou types de réalisation célèbres ne sont jamais évoqués, c’est simplement parce qu’ils ne présentent à mes yeux aucun intérêt. J’essaye autant que possible de ne pas accabler les mauvaises productions sauf lorsque celles-ci font l’objet d’une médiatisation unanimement complaisante, histoire d’ouvrir de petites brèches de contradiction un tant soit peu argumentées.

 

 

Pourquoi ne peut-on pas commenter les articles de DeA ?

Ce blog est produit, conçu et rédigé par une seule personne qui plus est très occupée. DeA est fermé aux commentaires pour éviter une modération nécessairement chronophage qui m’obligerait à réduire mes balades en pleine nature.
Cette question m’est posée depuis le début, et plus encore après la fermeture du site collaboratif Fous d’anim’ qui a manifestement laissé un grand vide dans la communauté des amateurs d’images animées. Ceux-ci devaient y trouver l’un des rares espaces d’expression, voire de débat, sur les thématiques qui les passionnaient.
Leur frustration s’est sans doute reportée sur les réseaux pseudo-sociaux. :)
Il serait d’ailleurs salutaire qu’un nouvel espace de ce type soit recréé afin que la parole sur l’animation ne demeure pas le monopole d’un aréopage d’experts assez peu habiles (ou résolus) à vulgariser leur discours.

 

 

Pourquoi les rares médias sérieux dédiés à la création animée n’évoquent-ils jamais certains sujets pourtant essentiels pour comprendre son évolution sociologique ? Pourquoi la critique négative est-elle quasiment absente dans ces mêmes médias ?

Il faudrait le leur demander ! J’ignore ce qu’il en est dans les autres pays mais, en France, je présume qu’ils ne sont pas assez indépendants financièrement pour se permettre de critiquer ou d’ignorer certaines productions ou certains artistes pourtant très médiocres. Leur ligne éditoriale, intimement corrélée à leur modèle économique, ne leur permet probablement pas non plus de critiquer le système qui les nourrit.
De surcroît, j’ai souvent le sentiment que le milieu de la création animée, et spécifiquement celui du cinéma d’animation, n’est pas encore capable de supporter l’ironie, la satire et l’auto-dérision. Et ce en dépit de son ancienneté et de sa décontraction de façade. Par exemple, je suis toujours frappé de constater l’absence d’humour (c’est un euphémisme) dans toute la prose francophone consacrée à l’animation. Le discrédit permanent de l’animation dans les médias de masse et dans les institutions culturelles est à l’évidence en grande partie responsable de cette pudeur à embrasser de manière critique, voire engagée (ce qui n’exclut pas l’humour, au contraire), les sujets socio-économiques, politiques au sens large du terme.
Néanmoins, depuis quelques années, les lignes bougent. Désormais, on questionne frontalement – sur Internet – la place des femmes dans l’industrie animée, la représentation féminine ou non-genrée à l’écran, les transversalités avec le réel. On s’inquiète aussi ouvertement de l’impact écologique désastreux de la fabrication, du stockage et de la diffusion des images animées. La presse écrite, toujours en retard de quelques années, prendra le train en marche prochainement, ça ne fait aucun doute.

 

Quels sont les articles de “Desseins animés” les plus consultés à ce jour ?

Je ne m’étais jamais posé la question jusqu’ici ! Les résultats de quelques requêtes statistiques (ci-dessous) montrent un réel intérêt de la part des internautes de DeA pour les livres et revues – les supports physiques – traitant d’animation de manière “anti-conformiste”, pour les sujets peu ou pas traités ailleurs, et même pour certaines œuvres que je pensais moi-même condamnées à l’oubli progressif. Je constate notamment, non sans auto-satisfaction, que des articles qui ne contiennent parfois que les références et le sommaire d’un ouvrage, bénéficient d’une belle audience. A bon entendeur…

Articles, consacrés à des publications (livres, revues, DVD), les plus consultés en avril 2022
1. ArtPress 2 – Le cinéma d’animation – Tout public
2. Youri Norstein/ Franceska Yarbousova – catalogue d’exposition
3. L’animation japonaise en France
4. Isao Takahata – Cinéaste en animation
5. La Bergère et le Ramoneur de Paul Grimault et Jacques Prévert
6. Alexandre Alexeieff – Écrits et entretiens sur l’art et l’animation (1926-1981)
7. Première fiche pédagogique transmédias consacrée à un court métrage d’animation
8. La couleur des films
9. Abécédaire de la fantasmagorie – Suite
10. L’animation japonaise indépendante vol.1 /DVD

Articles, consacrés à des aspects historiques ou sociologiques de l’animation, les plus consultés
1. Les “œuvres classiques du monde entier” dirigées par Isao Takahata
2. Désespérant !
3. Persistence of Vision au Forum des Images
4. Pénis, cul, bite chatte, nichons, couilles (NSA song)
5. On avance !
6. Une modernité rétro-éclairée
7. Un soleil radieux (Souvenirs au compte-goutes)
8. Tous les prix Émile Reynaud
9. The Big Knights
10. L’industrie machiste de l’animation

Articles, consacrés à des œuvres ou travaux d’artistes, les plus consultés
1. “L’homme blessé” de Lascaux
2. Le thaumatrope préhistorique
3. Robinson Crusoe de Stanislav Latal
4. Le déjeuner sur l’herbe de Pritt Pärn
5. Les livres flippés de Marie Paccou
6. Impression de montagne et d’eau, et autres histoires
7. L’animation antique des frises du Parthénon
8. Les têtards à la recherche de leur maman
9. Aître ou ne pas aître St-Maclou
10. La jeune fille sans main (le dossier)

 

Quelles évolutions sont envisagées pour DeA ?

Je n’en sais absolument rien. Mes nombreuses autres activités me laissent de moins en moins de temps à consacrer à sa rédaction. J’aimerais par exemple publier plus d’interviews de professionnels, dont la transcription des nombreux entretiens réalisés par le passé depuis 1995. J’aimerais aussi terminer les séries d’articles, comme “Pornographies animées“, que j’ai dû interrompre faute de pouvoir allouer le temps nécessaire à ce sujet tentaculaire.
J’alimente aussi, lentement mais sûrement, un glossaire simplifié et illustré du jargon de la création animée. Je l’aurais peut-être finalisé dans dix ans.

 

Recrutez-vous les nouveaux rédacteurs ?

Non.

 

Peut-on soutenir financièrement DeA ?

Non.

 

Pourquoi ne lancez-vous pas une chaîne vidéo DeA ?

(Rires)

 

Illustrations de cet article :
• En-tête : “Paramétric expressions” de Mike Pelletier
• Image extraite du livre “La couleur des films ” d’Alexandre Tournay
• Plan extrait du film Inner Odyssey de Tatsuhiro Ariyoshi
• Extrait de l’affiche du festival Animateka 2019
• Extrait d’un “livre flippé” de Marie Paccou
• Extrait d’un décor de Masahiro Ioaka pour la série “Heidi, petite fille des Alpes” d’Isao Takahata
• Peinture de Horyon Lee
• Extrait d’une séquence animée par Terry Gilliam pour l’émission “The Monty Python’s Flying Circus”
• Lettrage organique d’Ari Weinkles
• Extrait d’une photographie de Frédéric Fontenoy
PS : Merci à Lisa J. Coleman et longue vie à Animation Nightmare !

 

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