Quelle mouche a bien pu piquer simultanément les nombreux médias de masse qui ont relayé en chœur ce week-end, soit deux mois après leur publication par le Centre National du Cinéma et de l’image animée, les excellents chiffres de l’exportation de programmes d’animation français ? Raréfaction des bons résultats en matière de commerce extérieur ? Habituel retard à l’allumage en ce qui concerne les secteurs marginaux de la culture ? Torpeur estivale ?
D’aucunes mauvaises langues émettent l’hypothèse d’un effet « université d’été du Medef », où, comme je l’ai indiqué l’année dernière, le marché de l’animation française est devenue l’un des faire-valoir emblématiques du discours grand-patronal, via le Syndicat des Producteurs de Films d’Animation* (SPFA). Les services « économie » de nos principaux organes de presse couvrant unanimement ce raout annuel « incontournable », ceci expliquerait peut-être cela…
Mais, ne donnons pas trop d’échos ici à ces médisances et focalisons-nous sur l’essentiel : l’animation industrielle nationale – ou « initiée » par des fonds français (la nuance est importante) – s’est rarement aussi bien portée !
Volumes de production en forte augmentation, relocalisation significative des dépenses de production, augmentation de la part des rediffusions, « consommation délinéarisée(1) de programmes jeunesse en forte croissance« , leadership à l’exportation des programmes (notamment vers les territoires jadis moins poreux aux productions françaises, Royaume Uni et États-Unis en tête), situation inédite de plein-emploi, voire de « sur-emploi », …
Tout invite à l’auto-congratulation victorieuse.
Cette fois encore, je ne me risquerais pas à un commentaire détaillé des entre-lignes de ce rapport en trompe-l’œil. Je n’en ai ni le temps, ni l’envie. Et je peux aisément parier sur l’intelligence des lecteurs de ce blog pour déceler par eux-mêmes les raccourcis, les silences pudiques et autres arrangements avec la réalité des réussites économiques arborées en étendards.
Je formulerai cependant le souhait que les signaux encourageants qui foisonnent dans ce bilan annuel incitent enfin nos décideurs institutionnels – principalement en régions – à soutenir concrètement le développement d’offres publiques susceptibles de stimuler sur le long terme la diversité artistique de la création audiovisuelle au sens large, tout en facilitant la vitalité et la pérennisation d’un vivier conséquent d’emplois stables (autrement dit « non-précaires »), non-délocalisables, transversaux, générateurs de valeurs patrimoniales.
Il n’est pas interdit de rêver…
> Téléchargez le rapport du CNC « Le marché de l’animation en 2016 »
> Téléchargez le communiqué du presse élogieux du SPFA
(1) Contournement de la diffusion linéaire, c’est-à-dire imposée par une grille-horaire de programmes, grâce aux fonctionnalités de « podcast » ou de « catch-up TV ».
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