Unicorn Wars

 

 

Un film d’Alberto Vázquez
Traduction : La guerre des licornes
Année de sortie : 2021
Origine(s) : Espagne, France
Sortie française : 28 décembre 2022

 

Ou « un gros cœur d’amour sur toi » ne suffira peut-être pas.

 

“Camp de l’amour – Honneur, douleur, câlins”

 

Réaction à chaud

Difficile de ne pas saluer le deuxième long métrage d’Alberto Vázquez, tant l’existence même de ce type de proposition animée pour public adulte est appelé de mes vœux depuis longtemps. Difficile aussi d’être trop rude à l’égard de cette production de grande qualité, porteuse de messages politiques transversaux, si salutaires face à l’immobilisme et au déni des peuples planétaires incapables de renoncer à leurs tendances auto-destructrices sous fallacieux prétextes impérialistes/civilisateurs/productivistes/consuméristes, au choix. Ne boudons donc pas notre plaisir, les films (vraiment) punks – énergiques, provocateurs, immoraux, désabusés – sont si rares, en particulier en Europe occidentale dont l’écrasante majorité des productions reste, par souci de rentabilité, désespérément engluée dans une bien-pensance aseptisée jusqu’à la moelle.

Ceci étant dit, cette histoire modérément ironique de bisounours masculinistes, conditionnés pour éradiquer la race exclusivement féminine des licornes noires (le slogan de l’affiche française ne contredit-il pas le sous-texte prétendument féministe de ce récit ?), une histoire qui oscille sauvagement entre la fable pseudo-prophétique, le récit anti-militariste qui se complaît cependant dans une violence sanguinolente suspecte, et le divertissement subversif en forme de comédie hallucinée, m’a laissé perplexe quant aux réelles intentions de son auteur (le plan final relativement réchauffé était-il si indispensable ?).
En tant que programmateur de films d’animation, en terme de ciblage des publics d’une œuvre aussi ambiguë, beaucoup trop référencée et absconse pour les ados et jeunes adultes, formellement peu innovante pour en faire une expérience visuelle marquante, un brin trop immature dans l’écriture pour les amateurs d’art cinématographique, je m’interroge sur la propension du film à susciter le bouche-à-oreille indispensable à sa survie sur les écrans au-delà de sa première semaine d’exploitation.

Pour être tout à fait franc, quelque chose m’a perturbé le visionnage d’Unicorn Wars, à savoir sa proximité, volontaire ou non, avec un long métrage japonais, de vingt ans son prédécesseur, Tamala 2010 – A punk cat in space, commis en 2001 avec des moyens dérisoires par le duo de designers et musiciens “tree of Life” (t.o.L).
Si le postulat artistique identique aux deux films, consistant à prendre à contre-pied des motifs de la pop culture édulcorée pour raconter la fabrique du consentement et des haines collectives irrationnelles par les dogmes totalitaires et religieux, Unicorn Wars, qu’Alberto Vázquez définit lui-même comme un “croisement entre Bambi, Apocalypse Now et la Bible”, s’en tient à un seul niveau, linéaire et unidimensionnel. Quand Talama 2010 arborait plus modestement des qualités artistiques autrement plus stimulantes, par la multiplicité de ses esthétiques et de ses déclinaisons, et par une mise en abîme labyrinthique et vertigineuse de la perversion du design graphique protéiforme comme arme d’instrumentalisation massive des consciences.
Autrement dit, je crains que l’argument du détournement comico-trash d’univers acidulés et inoffensifs, sur lequel repose presque exclusivement l’intérêt d’Unicorn Wars, ne suffise pas à contenter les amateurs de cinéma alternatif, qu’ils aient au préalable fumé la moquette ou simplement siroté un verre de bon vin.

 

 

Quelques échos ou coincidences troublantes :

Lavage de cerveaux et embrigadement

 

Fresques commémoratives d’apocalypses instrumentalisées
Invectives et slogans contradictoires
Méchants zombifiés

 

 

 

Toutes les images de Unicorn Wars sont © Uniko – Autour de Minuit – Abano – Schmuby
Les photogrammes de Tamala 2010 sont © t.o.L – Tamala 2010 Project

 

 

anima