Les vendredi 9 et samedi 10 octobre 2015, s’est tenue dans le cadre prestigieux de l’Abbaye Royale de Fontevraud la 4e édition des « Chemins de la création », rencontres professionnelles dédiées à l’écriture du cinéma d’animation. Comme chaque année, le programme était riche et dense en conférences, tables rondes et « grands entretiens » avec des personnalités incontournables de la création animée (Michel Ocelot, Pritt Pärn, Georges Schwizgebel, …). Parmi les communications proposées, celle de Georges Sifianos m’a particulièrement interpellé.
Enseignant à l’ENSAD, plasticien, réalisateur, historien et théoricien de l’animation, Georges Sifianos mène depuis plusieurs années une étude passionnante consacrée aux frises du Parthénon. Ses recherches et son analyse poussées de l’œuvre antique, dispersée aux quatre coins du monde, l’ont conduit à des conclusions absolument vertigineuses, qu’il développe dans des conférences (Fontevraud fut la première en France, sauf erreur) intitulées « Phidias animateur ? – De l’analyse du mouvement, à la structure musicale et au contenu philosophique de la Frise du Parthénon« .
Il s’agit ni plus ni moins que d’une lecture inédite de l’ensemble de bas-reliefs attribués au sculpteur grec Phidias (Ve siècle avant JC) éclairant trois dimensions convergentes et complémentaires de son chef d’œuvre. Une dimension « animationnelle » (l’analyse de plusieurs segments des frises dévoile des « animations latentes »), une dimension « philosophique » (l’œuvre comme « objet philosophique, conçu pour être contemplé mentalement plutôt que visuellement« ) et une dimension « symphonique » (l’organisation des motifs sculptés constituant une véritable partition qui remet en question tous les acquis de la musicologie et les origines de la composition polyphonique). Sur ce dernier aspect, probablement le plus jubilatoire, Georges Sifianos pousse le bouchon jusqu’à nous faire entendre la musique des frises du Parthénon.
On savait depuis les travaux de Marc Azema, Matt Gatton, Isao Takahata (entre autres) que l’homme n’a pas attendu l’invention de la caméra pour intégrer dans ses récits figurés le mouvement, la continuité temporelle, un langage pré-cinématographique élaboré. La thèse de Georges Sifianos met au jour un nouveau chaînon de la longue préhistoire du cinéma, qui comme toute découverte archéologique majeure rend l’homo sapiens sapiens – accessoirement spectateur compulsif – beaucoup, beaucoup plus humble.
> visionner la conférence de Georges Sifianos sur l’animation dans les frises du Parthénon

Toutes les images de cet article sont © Georges Sifianos
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