Comment en est-on arrivé là ?

peppa_pig_parodie

Sur les plateformes de diffusion de vidéos en ligne, la prolifération des parodies douteuses de films d’animation pour les tout petits commence à peine à devenir un sujet de préoccupation médiatique.
Mieux vaut tard que jamais.

Voilà quelques semaines, YouTube a fait semblant* de prendre la mesure du problème en annonçant l’installation des systèmes de filtrage ou de blocage pour empêcher les spectateurs innocents de tomber malencontreusement sur des séquences cauchemardesques de Peppa Pig massacrée par un dentiste sadique ou d’Elsa (star peroxydée du dégoulinant Frozen) trucidée par Venom (le démon de Spiderman). Le détournement parodique n’ayant en soi rien de répréhensible, il est utile de préciser que ces contenus ouvertement malveillants – ou simplement imbéciles – sont conçus pour se confondre avec le flux des programmes officiels, profitant de l’ignorance parentale désinvolte en matière d’usage des supports mobiles connectés à l’Internet.
Difficile de se plaindre en effet lorsqu’on laisse ses gamins – dès deux ou trois ans – surfer librement sur l’Internet à partir de tablettes tactiles.
Et les annonces récurrentes du ministère de l’Éducation nationale quant à l’équipement généralisé des écoles maternelles avec ces joujoux aux vertus pédagogiques très relatives ne devraient qu’aggraver la situation, à lire les avertissements répétés de la très sérieuse Association « Alerte Écrans« .

Ces détournements, donc, qui viennent polluer les contenus « pre-school », ne sont pas tombés du ciel du jour au lendemain.
Ils constituent le prolongement d’une tendance lourde et extrêmement rapide : l’animation parodique à caractère déviant. Un registre au moins aussi âgé que le cinéma d’animation lui-même qui connaît néanmoins un regain de vitalité (c’est un euphémisme) sous l’action combinée de l’élargissement de la couverture planétaire de l’Internet à haut débit et de sa démocratisation sur des outils mobiles de consultation.
Fabriquée de manière industrielle, avec une qualité elle-aussi indéniablement à la hausse, la production de ces vidéos déviantes a pu largement s’expérimenter, s’enraciner et s’épanouir sur les plateformes de diffusion de contenus pornographiques – YouPorn** en tête – sans que personne ne s’en offusque. Tel un vulgaire chiendent, la voici maintenant qui prolifèrent naturellement au-delà de ses plates-bandes originelles.

De trop rares observateurs – pédopsychiatres et experts du développement cognitif – mesurent encore assez mal l’ampleur du phénomène. Mais tous s’accordent au moins sur le fait qu’il illustre une étape préoccupante des profonds bouleversements en cours, potentiellement universels, qui impactent et impacteront toujours plus la perception du monde global et les relations sociales locales des générations d’humains nés avec l’Internet et les objets connectés mobiles dans la continuité de leurs mains. Si nous continuons à nous laisser dominer docilement par les puissances qui tirent profits de ces technologies aux bénéfices discutables les conséquences pourraient devenir désastreuses.

Aujourd’hui, suite au raout organisé par la présidence de la République française au cœur du plus fastueux symbole de l’Ancien Régime (« absolutiste », fait-il le rappeler) dans le but de draguer les global leaders grands groupes multinationaux, majoritairement emmenés par les « géants du web », ont été formulées par Google, Facebook et consorts de jolies promesses d’investissements massifs pour l’éducation « gratuite*** » au numérique sur le sol français.
Est-ce vraiment une bonne nouvelle ?

 

* On lira avec intérêt cet article explicitant le caractère imparfait, voire inadéquat, des algorithmes de YouTube, censés filtrer ou bloquer les contenus problématiques.
** Participe, avec YouTube, de l’écosystème Google.
*** Rappelons l’adage : « si c’est gratuit, vous êtes la marchandise. »

 

 

anima