Pour célébrer le 70ème anniversaire de la capitulation du Japon marquant la fin de la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement majoritairement ultra-conservateur de ce beau pays a enfin réussi à sérieusement ébrécher l’article 9 de sa Constitution, celui-là même qui interdisait « définitivement » à l’armée nippone la moindre implication militaire dans un conflit international.
Les attaques en règle contre cet article particulièrement pénalisant pour l’industrie locale de l’armement ne datent pas d’hier et on se souvient par exemple du tollé national que provoqua en 2003-2004 l’engagement des « forces d’autodéfense » du Japon derrière la clique de Georges W. Bush lors de la seconde « guerre du Golfe » contre leur inénarrable « Axe du Mal ». Mais malgré la levée de boucliers des mouvements pacifistes, ou tout simplement progressistes, que compte la société japonaise, c’est le bon sens ultra-libéral – si prompt à instrumentaliser les peurs et les vieux réflexes patriotiques – qui l’a emporté une fois de plus sur la raison. Le 18 septembre 2015, par 148 voix contre 90, et ce en dépit d’une mobilisation populaire massivement hostile au « coup d’État parlementaire » du gouvernement de M. Shinzo Abe, le texte de loi introduisant la notion « d’autodéfense collective » (admirable trouvaille sémantique !) fut adopté, non sans quelques échanges de baffes entre députés.
Et là je sais ce que vous vous dites : nous pouvons nous sentir fiers, nous Français, de vivre dans un pays civilisé incapable de céder à de telles régressions sociétales au prétexte d’un virilisme nécessaire face à la brutalité du monde globalisé !
Publié en 2004 par l’éditeur Magazine House Co. et réalisé par un collectif d’une vingtaine d’artistes, l’album illustré « What Happens Before War? » (« Qu’est-ce qui conduit à la guerre ? ») vulgarisait avec une simplicité enfantine, le scénario d’une population entraînée avec son consentement docile dans la spirale infernale de la guerre, institution non-démocratique par excellence, s’il en est.
Suite au tsunami du 11 mars 2011 qui frappa la côte nord-est du Japon et engendra l’une des plus importantes catastrophes nucléaires jamais connues dans le monde, NOddIN, un autre collectif de citoyens engagés, accessoirement animateurs, a produit une adaptation animée de « What Happens Before War? », laquelle nous arrive enfin via l’Internet en version originale (sous-titres anglais via l’interface de You Tube). Cela dit, nul besoin d’en comprendre les paroles pour accéder au raisonnement implacable que ce film déploie sans occulter – c’est là son grand mérite – le rôle central des puissances financières, des médias et des politiciens à leur solde dans le déclenchement, l’alimentation et le service après vente des conflits armés.
Et là je sais ce que vous vous dites : nous pouvons nous sentir fiers, nous Français, de vivre dans le « pays des droits de l’homme sous état d’urgence illimité » sans qu’aucune initiative citoyenne d’envergure émanant du milieu artistique ou plus généralement culturel ne conteste les dérives guerrières et sécuritaires de ses dirigeants de petit calibre !
> Visionner What Happens Before War? sur le site de NOddIN
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