La colonne Trajane

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Cette frise de 200 mètres se développe autour d’une colonne creuse de 30 mètres de hauteur (hors piédestal, chapiteau et attique).
Sa construction a commencé en 107 (après JC) ; elle fut « dédiée » en mai 113.

L’ensemble de bas-reliefs, enroulés de manière hélicoïdale de la base vers son sommet, comporte 184 scènes sculptées qui exposent 2500 personnages pour illustrer les deux campagnes conduites par l’Empereur Trajan contre les Daces (actuelle Roumanie). Bien qu’il n’en subsiste aucune trace, la fresque était probablement peinte – comme c’était la règle à l’époque – et rehaussée par endroits d’ajouts métalliques (épées et autres armes et outils) sur des personnages.

De par la configuration des lieux, la lecture de l’intégralité du récit déployé ne pouvait être parfaitement perçue. Du sol, en tournant autour de l’édifice, le lecteur/spectateur contemporain de sa réalisation ne comprenait que les cinq à six premiers niveaux. Il fallait s’éloigner et monter dans les étages des bibliothèques qui encadraient la colonne pour en observer partiellement les niveaux supérieurs. Les contrastes de couleurs facilitaient ainsi l’appréhension schématique des différents épisodes relatés, épisodes que l’on peine à identifier dans la monochromie et l’agencement actuels du monument.

Il n’existe pas, à ma connaissance, d’ouvrage sérieux dédiés à l’analyse de la continuité narrative de la colonne Trajane. En particulier, d’étude comparative avec des œuvres postérieures qui lui sont portant très proches, la broderie de Bayeux et les rouleaux peints japonais en l’occurrence. On trouve en effet dans les trois dispositifs, une presque grammaire proto-cinématographique, c’est-à-dire les prémisses du langage des bandes dessinées, notamment dans l’enchaînement elliptique des « séquences », matérialisé par des motifs architecturaux ou végétaux ou la « caractérisation graphique » de personnages importants reconnaissables d’une scène à l’autre. Sans compter, la présence d’apartés métaphoriques induisant par endroits des doubles niveaux de compréhension.

 

Les « arbres transitionnelles », dans le récit de la colonne Trajane, la « Tapisserie de Bayeux » (11e sècle) et le « Shigi-san engi emaki » (rouleau des légendes du Mont Shigi, 12e siècle), sont utilisés, entre autres, pour signifier l’écoulement du temps ou le rapprochement de deux moments éloignés d’un même événement.

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Ce principe est toujours utilisé aujourd’hui, au cinéma notamment. On en trouve un exemple remarquable dans la scène finale du long métrage de Nobuhiro Suwa et Hippolyte Girardot, Yuki et Nina(2009). Désespérée par la décision irrévocable de sa mère japonaise de quitter la France et son mari pour retourner vivre dans son pays d’origine, la jeune Yuki décide de fuguer avec son amie Nina. Les deux fillettes se perdent dans une forêt française et se retrouvent séparées. Yuki avance seule et ressort soudain à l’orée d’une forêt japonaise.

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> site web (en anglais) très complet sur le sujet

> une reconstitution exemplaire de National Geographic
+ un film d’animation en stop motion expliquant le mode de construction de l’édifice

 

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