Plan extrait du film : Ôkami kodomo no Ame to Yuki
Réalisé par : Mamoru Hosoda
Japon / 2012
Lorsque l’un des deux “enfants-loups” du film éponyme de Mamoru Hosoda décide de répondre, contre toute attente, à l’appel de son instinct animal, c’est au cœur de la forêt qu’il conduit sa mère, à la rencontre du renard-maître des lieux. Des deux progénitures de l’homme-loup Ôkami, Ame reçoit la révélation de son destin mystique de protecteur du “refuge des divinités” (lequel couvre plus des trois quarts du territoire nippon) au sein duquel il est initié à la connaissance de son futur domaine.
Aussi, l’apparition de ce plan à la symbolique plus qu’évidente peut prêter à sourire compte tenu de la naïve simplicité du sur-commentaire qu’impose la composition graphique des éléments qui le constituent. L’encadrement, formé par les deux troncs placés de chaque côté de l’image, dessine les contours d’un cœur schématique, quant l’arbre vénérable en son milieu convoque la représentation résolument organique de la pompe cardiaque avec ses artères et ventricules. La vie elle-même y est matérialisée par la figure de l’animal qui siège en son centre.
Ce plan apparaît trois fois dans le film. Répété une première fois à quelques secondes d’intervalle (Ame rejoint son maître), il est repris une troisième fois à l’apogée de la séquence de climax qui permettra à l’héroïne du film, Hana la mère des enfants-loups, d’accomplir le deuil de son fils. Un deuil explicitement symbolisé par la figure sans vie du “cœur de la forêt” reproduite dans une gamme colorimétrique sombre et froide comme la mort (Hana poursuit désespérément Ame, parti remplacer son maître décédé). Hana restera extérieure à ce cœur métaphorique et retournera finalement dans la société des humains.
Mais au-delà du symbole cul-cul la praline, il y a dans ce plan un subtil clin d’œil au long métrage fondateur de Walt Disney, Blanche-Neige et les sept nains et à la règle de composition centripète de la plupart de ses plans. Ce type d’agencement de la mise en scène d’un classicisme suranné, principe surexploité depuis 1937 dans l’écrasante majorité des longs métrages d’animation, impose au spectateur l’attraction inéluctable de son regard vers le centre du plan.
Si j’osais, en m’appuyant sur cette seule citation visuelle, j’aurais bien envie de contre-argumenter la qualification (par raccourci médiatique fainéant plus que par conviction factuelle solide) de “nouveau Miyazaki” attribuée de manière un brin exagérée à Mamoru Hosoda, aux prétextes que ce dernier a développé le premier storyboard du Château ambulant, ou qu’il partagerait avec le grand patron du Studio Ghibli la contemplation bienveillante de la nature préservée de l’anthropie (comme plusieurs millions de personnes sur cette Terre, il me semble), voire qu’il serait vital – , par peur du vide sans doute et non par facilité mercantile ça va de soi – de désigner d’urgence un héritier au réalisateur de Mon voisin Totoro.
Mais je m’abstiendrais au risque de devenir un peu désobligeant …
Une image-ricochet
Plan extrait de Snow White ans the seven dwarfs (1937) et l’illustration préparatoire de Gustaf Tenggren
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