Long métrage de Will Vinton
Distribution/édition : Films du Paradoxe
Durée : 86 mn
La figure emblématique de Will Vinton a injustement été éclipsée en Europe par le succès des œuvres plus récentes du studio Aardman (Wallace, Gromit, et consorts).
Elle gagne pourtant à être (re)découverte à l’aune des récentes publications des Films du Paradoxe.
La première d’entre elles ramène sur nos écrans un extraordinaire long métrage, produit et réalisé par Vinton en 1985 selon le procédé de « claymation » qu’il inventa avec son comparse Bob Gardiner, à partir de 1972. Un procédé fabuleux où tout ce qui apparaît et bouge à l’écran est modelé et modifié manuellement, dans le moindre détail, image-par-image, décors et effets visuels inclus, avec de la pâte à modeler.
Les nombreuses séquences aériennes des Aventures de Mark Twain – au-dessus des nuages, dans la tempêtes, au cœur de la comète de Halley où le personnage principal conduit ses propres créatures de fiction – sont saisissantes. On comprend mieux au passage l’origine de l’art de Joan C. Gratz (Mona Lisa descending a staircase), créditée à la direction artistique. L’artiste aura eu en effet sur ce long métrage toute la latitude pour développer sa propre approche du médium – la « claypainting » – jusqu’au degré de perfection ultime qui lui vaudra un Oscar huit ans plus tard.
Avec son regard pétillant, sa calvitie rayonnante et sa belle grosse moustache en pointe, Will Vinton est un fou génial (lui utilise le terme de « puriste »), inspiré, cultivé, nourri par l’ambition de tirer l’image animée vers le haut, sans céder au formatage et aux diktats ridicules imposés par le marketing tout-puissant. Il l’apprit d’ailleurs à ses dépens au début des années 2000, lorsque son principal actionnaire (vendeur de chaussures de riches fabriquées à un dollar de l’heure par des enfants de pauvres) pris le contrôle de son studio pour créer Laïka, dont les ambitions étaient tout autres.
Sachant cela, Les aventures de Mark Twain peut aisément être considéré comme un film-manifeste. Refusant fermement la mièvrerie imposée par le lissage mercantile, plaçant à sa proue l’un des penseurs américains les plus visionnaires et subversifs de son temps (« la providence protège les enfants et les idiots« ), confrontant ce dernier à ses doutes et ses blessures, titillant sans pincettes le puritanisme (sinon le créationnisme moyen-âgeux) d’une immense nation, fracturée par définition.
Go, Will, go !
Bonus : « L’animation en trois dimensions » (17 mn)
Vinton et son équipe se mettent en scène avec humour pour raconter les spécificités de la production de films en « claymation ».
> Le site des Films du Paradoxe
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