Look Back

 

Un film de Kiyotaka Oshiyama
d’après le manga de Tatsuki Fujimoto
Titre original : ルックバック
Année de sortie : 2024
Origine(s) : Japon
Sortie en salles uniquement les 21 et 22 septembre

 

Ou le cœur à l’ouvrage

 

Où, ailleurs qu’au Japon, se permet-on de produire de pareils dessins animés ?
Deux jeunes filles à la sociabilité radicalement différente se rapprochent grâce à leur passion commune pour le dessin de manga. La relation d’amitié qui les conduit de la création collaborative à la reconnaissance publique précoce est percutée par un événement tragique, sur lequel la fiction n’aura aucune prise et qu’il faudra bien dépasser avec les moyens du bord.
Ici pas de télescopage avec un univers fantastique, ni de romantisme nunuche ou d’exubérances comportementales, simplement la trajectoire, dans un contexte ordinaire, de jeunes femmes presque banales, totalement dévouées à l’art dans lequel elles s’abîment prostrées sur leur table de travail. Le film bien nommé nous offre à regarder l’une d’entre elle, Ayumu Fujino, de dos et à la juste distance pour partager ses émotions intimes. Et quand celle-ci regarde en arrière, c’est l’épanouissement de son amie Kyōmoto, autrefois coupée du monde, qui illumine ses souvenirs.

Le brillant et jeune réalisateur Kiyotaka Oshiyama, en digne héritier de la veine néo-réaliste de l’animation japonaise longtemps exploitée seul par Isao Takahata, n’a besoin ici que de 57 minutes pour s’affirmer sans esbroufes comme un cinéaste multi-tâches (scénariste, metteur en scène, designer des personnages, chef animateur) avec lequel il va désormais falloir compter. L’oubli de soi de ses deux personnages dans le sacerdoce qu’est l’exercice professionnel du dessin de bandes-dessinées et d’animation ne lui est certainement pas étranger, au point d’ériger cette qualité (ou ce défaut, c’est selon) en fil conducteur de son récit comme de sa dramaturgie, aussi pudique et qu’émouvante.

Une autre question cruciale me taraude : comment le Festival d’Annecy 2024 a-t-il pu exclure cette œuvre importante de sa compétition au profit de plusieurs réalisations de bien moindre envergure cinématographique ?
Quant aux conditions de son exploitation française, mieux vaut en rire…

 

 

anima